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Trajectoires

Commissaires

Catherine Barnabé / Ludmila Steckelberg

11 mai - 19 juin 2016

Une trajectoire est un tracé, un chemin parcouru par un corps en mouvement qui mène d'un point à un autre ; il n'est pas question d'errance, mais de savoir ou l'on va.

Présentation des artistes

LYSETTE YOSOLEVITZ

 

Mexique

Lysette Yoselevitz articule sa pratique artistique autour des questions identitaires. Ainsi, elle aborde dans des œuvres multidisciplinaires ses origines mexicaines, son appartenance religieuse juive, ses conditions

de femme et d’immigrante. C’est en se basant sur cette construction hété-rogène d’elle-même, sur son propre parcours, et en interrogeant son expérience du deuil qu’elle crée des œuvres qui composent un espace conceptuel. Celui-ci a pu être mieux défini avec son immigration au Canada, qui lui a permis de devenir pleinement artiste et d’articuler sa pratique. Alors que la situation de la femme au Mexique est plus ancrée dans des rôles traditionnels et qu’elle s’y sentait confinée, à Montréal,

elle a trouvé une plus grande liberté pour développer son langage plastique et tenter de répondre à ses questionnements.

Racines / Raíces

KHADIJA BAKER

 

Syrie

Khadija Baker est une artiste multidisciplinaire qui travaille principalement des installations combinant vidéo, art numérique, son, animation et textile. Ces œuvres sont pour la plupart créées in situ et impliquent le visiteur à différents niveaux : par des caractéristiques sensorielles ou encore par la création d’un espace actif propice à l’échange et au partage de récit.

Elle a également une pratique performative, soit devant public et docu-menter en vidéo, soit vidéographique. La per- formance chez Khadija est un acte d’affirmation : en utilisant son corps, elle sent qu’elle s’impose en tant qu’artiste, en tant que femme. En prenant sa voix, elle peut ainsi

briser l’image du rôle traditionnel de la femme syrienne, qui est à la maison, qu’on ne peut voir, qu’on ne peut toucher. Dans ses performances, elle est près des gens qui prennent part à ces actions, dans son travail

en général, c’est la même idée de proximité et d’échange avec l’autre

qui est manifeste.

Coffin / Nest

DOROTHÉE NOWAK

 

Pologne / France

Née en France de parents polonais, les questions de la migration et du voyage ont toujours été au cœur des préoccupations Dorothée Nowak. Même si elle n’a jamais habité la Pologne, elle y a fait plusieurs aller-retours au cours de son enfance passée dans le Nord de la France. Très jeune, elle a été habituée aux aux revoirs et aux retours, aux pleurs et aux déchirements de quitter ceux que l’on aime et que l’on ne voit que trop rarement. Ceci a eu pour effet de lui donner envie de voyager et de vivre ailleurs. Tôt dans son parcours, elle part étudier à l’étranger, en Sicile puis à Séville. Alors qu’elle revient en France pour terminer ses études, elle se penche sur la question des migrants de Calais, un projet qui a pour sujet l’art politique et le témoignage. Elle vient ensuite à Montréal pour une année, repart en Australie rejoindre son frère, puis elle y rencontre son futur mari avec qui elle voyage durant deux ans, visite les familles respectives en France, en Pologne et au Japon et revient au Canada en 2014. Ils vivent à Montréal depuis, mais repartiront certainement.

Dom Polski

Documentation

« Nos oies et nos papillons migrateurs nous offrent une belle leçon de géographie. Ils archivent au sol leurs mouvements aériens. Une plume ou une aile communiquent l’ampleur de la migration. Entre ciel et sol, un détail nous rappelle à l’ensemble.

Les frontières, aussitôt apparues, s’effacent. »

Extrait tiré du livre Trois odyssées transfrontières
BEAULIEU, PATRICK et CANTY, DANIEL. Trois odyssées transfrontières. Montréal : Les éditions du passage, 2015.
PATRICK BEAULIEU
Passe-frontières (extrait de la série)
Collection d’ailes de papillons monarques insérées dans des pages du livre Geografía física y humana
Photo : Paul Litherland

« Franchir la porte, passer le pont, traverser les frontières et partir au loin, tout cela requiert un peu (parfois beaucoup) d’audace et de curiosité. Mais concevoir la porte comme un seuil, le pont comme la matérialisation d’un désir d’autre rive et la frontière comme une ligne imaginaire, c’est réfléchir sur le sens des limites et les dépasser. »

Ibid., p. 12.

retour = nostos

 

algos = souffrance

grecque : nostaligie, nostalgia

 

espagnol : anoranza

 

portugais : saudade

anglais : homesickness

allemand : Heimweh

hollandais : heimwee

islandais : söknudur, heimfra

tcheque : stesk

« Le retour, en grec, se dit nostos. Algos signifie souffrance. La nostalgie est donc la souffrance causée par le désir inassouvi de retourner. Pour cette notion fondamentale, la majorité des Européens peuvent utiliser un mot d’origine grecque (nostalgie, nostalgia) puis d’autres mots ayant leurs racines dans la langue nationale : anoranza, disent les Espagnols : saudade, disent les Portugais.  Dans chaque langue, ces mots possèdent une nuance sémantique différente.  Souvent, ils signifient seulement la tristesse causée par l’impossibilité du retour au pays.  Mal du pays.  Mal du chez-soi.  Ce qui, en anglais, se dit : homesickness. Ou en allemand : Heimweh.  En hollandais : heimwee. Mais c’est une réduction spatiale de cette grande notion.  L’une des plus anciennes langues européennes, l’islandais, distingue bien deux termes : söknudur : nostalgie dans son sens général ; et heimfra : mal du pays. Les Tchèques, à côté du mot nostalgie pris du grec, ont pour cette notion leur propre substantif, stesk, et leur propre verge ; la phrase d’amour tchèque la plus émouvante : styska se mi po tobe : j’ai la nostalgie de toi : je ne peux supporter la douleur de ton absence. En espagnol, anoranza vient du verbe anorar (avoir de la nostalgie) qui vient du catalan enyorar, dérivé, lui, du mot latin ignorance (ignorer). Sous cet éclairage étymologique, la nostalgie apparaît comme la souffrance de l’ignorance. Tu es loin, et je ne sais pas ce que tu deviens.  Mon pays est loin, et je ne sais pas ce qui s’y passe.  Certaines langues ont quelques difficultés avec la nostalgie : les Français ne peuvent l’exprimer que par le substantif d’origine grecque et n’ont pas de verbe; ils peuvent dire : je m’ennuie de toi mais le mot s’ennuyer est faible, froid, en tout cas trop léger pour un sentiment si grave.  Les Allemands utilisent rarement le mot nostalgie dans sa forme grecque et préfèrent dire Sehnsucht : désir de ce qui est absent ; mais la Sehnsucht peut viser aussi bien ce qui a été que ce qui n’a jamais été (une nouvelle aventure) et elle n’implique donc pas nécessairement l’idée d’un nostos : pour inclure dans la Sehnsucht l’obsession du retour, il faudrait ajouter un complément : Sehnuscht nach der Vergangenheit, nach der verlorenen Kindheit, nach der ersten Liebe (désir du passé, de l’enfance perdue, du premier amour). »

KUNDERA, MILAN. L’ignorance. Paris : Éditions Gallimard, 2005, pp. 9-11.
Bureau de l'émigration à l'aéroport de Dorval
© Office du film du Québec

« Moitié français donc, et moitié libanais ?

Pas du tout! L’identité ne se compartimente pas, elle ne se répartit ni par moitiés, ni par tiers, ni par plages cloisonnées. Je n’ai pas plusieurs identités, j’en ai une seule, faite de tous les éléments qui l’ont façonnée, selon

un dosage particulier qui n’est jamais le

même d’une personne à l’autre. »

MAALOUF, AMIN. Les identités meurtrières. Paris : Éditions Grasset & Fasquelle, 1998, 189 pages.

« Dans la mobilité de la porte se révèle cette dynamique des contraires, de la clôture à l’ouverture, du dedans au dehors, du discontinu au continu, qui, selon (Georg) Simmel, structure la vie individuelle et sociale. En elle, la limite jouxte l’illimité, non à travers la géométrie morte d’une cloison strictement isolante, mais

à travers la possibilité offerte d’un échange durable. Une porte est faite pour s’ouvrir, pour entrer ou sortir, elle est symboliquement promesse d’hospitalité ou de liberté. »

« Le territoire a t-il une importance identitaire ? »

SEYMOUR, MICHEL. « Peuble et territoires », Philosophiques, vol. 39, no. 2, 2012.

HANNA MALEWSKA-PEYRE,  HANNA.  « L’identité négative chez les jeunes immigrés », Santé mentale au Québec,

vol. 18, no. 1, 1993, pp. 109-123.

LAPIERRE, NICOLE. Pensons ailleurs. Paris : Stock, 2004, p. 29.
Réfugiés syriens

Acculturation n.f. didact. Processus par lequel qqn, un groupe humain assimile une culture étrangère à la sienne.

 

Le Robert de poche, 2009

Assimilationnisme  correspond au concept traditionnel d’absorption. Cette orientation d’acculturation est adoptée par les membres de la communauté d’accueil qui s’attendent à ce que les immigrants renoncent à leur culture d’origine pour adopter la culture de la communauté d’accueil majoritaire. (…)

 

Ségrégationnisme est l’orientation choisie par les membres de la communauté d’accueil qui ne souhaitent pas que les immigrants adoptent ou influencent la culture d’accueil mais acceptent qu’ils conservent leur héritage culturel. (…)

 

Exclusionnisme est l’orientation qu’adoptent les membres de la communauté d’accueil qui refusent que les immigrants conservent leur culture d’origine et qui s’objectent à ce qu’ils adoptent ou influencent la culture d’accueil. (…)

BOURHIS, RICHARD, BARRETTE, GENEVIÈVE et MORICONI, PASCALE-AUDREY. « Appartenances nationales et orientations d’acculturation au Québec », Canadian Journal of Behavioural Science, vol. 40, no. 2, 2008.

Émigrant

 

Immigrant

 

Migrant

 

Exilé

 

Refugié

 

Déplacé

HELENA MARTIN FRANCO, Portrait d'une femme éléphant

HANNA MALEWSKA-PEYRE,  HANNA.  « L’identité négative chez les jeunes immigrés », Santé mentale au Québec, vol. 18, no. 1, 1993, pp. 109-123.

« Qu'en est-il lorsque, quittant un moment l'angle habituel de la diffusion et des migrations des productions locales ou nationales vers l'étranger, on adopte l'optique inverse de l'attrait que peuvent exercer le Canada, le Québec ou Montréal sur l'étranger? Qu'est-ce qui peut bien pousser des artistes, ou des aspirants artistes, à venir faire carrière ici ? Quel regard ces nouveaux arrivants portent-ils sur leur milieu d'adoption? Quelles sont notamment les conditions d'intégration professionnelle au milieu artistique lorsqu'on provient de l'étranger? Quelle est aussi, plus profondément, la relation entre la décision d'émigrer, la vie à Montréal et la poursuite d'un projet créateur? Comment, enfin, l'immigrant finit-il non pas tant peut- être par ressembler au « milieu », s'y intégrer ou s'assimiler, mais comment parfois, ou à la longue, parvient-il à le transformer, le faire « évoluer », le faire « bifurquer » ? Ce qui est, on en conviendra, une perspective bien différente mais non moins intéressante d'où considérer les effets de la mondialisation culturelle et de l'internationalisation des marchés de l'art sur la création. »

GUY BELLAVANCE (Sous la direction de). Monde et réseaux de l’art : Diffusion, migration et cosmopolitisme en art contemporain, Montréal : Liber, 2000.

Quelques lectures conseillées

Regard sociologique

 

JEAN, SANDRINE et GERMAIN, ANNICK.  « La diversité ethnique croissante des quartiers de classe moyenne dans la métropole montréalaise : des jeunes familles perplexes », Canadian Ethnic Studies, vol. 46, no. 2, 2014.

 

ARMONY, VICTOR. « Choisir le Québec », Le Québec expliqué aux immigrants. Nouvelle édition revue et augmentée, Montréal : VLB Éditeur, 2012.

SIMON, P. « Les statistiques, les sciences sociales françaises et les rapports sociaux ethniques et de race », Revue française de sociologie, 49, 1, 2008.

 

SCHNAPPER, DOMINIQUE. « La tradition de la pensée sociologique », Qu’est-ce que l’intégration?, Paris, Gallimard, 2007.

 

ROCHER, FRANÇOIS. « Sur les dimensions constitutives de la citoyenneté : perspective des minorités ethnoculturelles et religieuses dans un Québec à l’identité incertaine », Recherches sociographiques, vol. 56, no.1, 2015.

WACQUANT, LOÏC. « Les deux visages du ghetto. Construire un concept sociologique », Actes de la recherche en science sociales, no. 160, 2005.

 

TAYLOR, CHARLES. « Interculturalism of Multiculturalism? », Philosophy and Social Criticism, 38 (4-5), 2012.

ZOÏA, GENEVIÈVE. « Faut-il avoir peur de l’ethnicité? Le cas français », Anthropologie et Sociétés, vol. 34, no. 2, 2010.

Quelques lectures conseillées

 

Identité

AMIN, AZZAM. « Stratégies identitaires et stratégies d’acculturation : deux modèles complémentaires », Alterstice, 2(2), 2012, pp. 103 ‐ 116.

CAMILLERI, L. « Changements culturels, problèmes de socialisation et construction de l'identité », Actes du Colloque de Syracuse 1982, CRIV, Vaucresson, 1982.

MALEWSKA-PEYRE,  HANNA.  « Réflexions sur les valeurs, l'identité et le processus de socialisation », Droit et Société,

no. 19, 1991. Le rapport des jeunes au droit à l’Est et à l’Ouest, pp. 215 - 222.

OLIVIER, ÉMILE. Repérages. Montréal : Leméac, Collection l’écritoire, 2001.

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