Salade-herbier et partage de recettes - 22 et 23 août

Rhétorique combinatoires

Cet été, les placottoirs de la Place de Castelnau ce seront prêtés à une diversité de pratiques citoyennes et de partages des savoirs. Mais plus encore, les activités programmées par Espace Projet détonnent dans cet environnement collectif par l’intrigante formation hebdomadaire de groupuscules constitués de curieux et d’intéressés s’affairant à élaborer leur sensibilité particulière d’un sujet donné.

Au sein de ces agoras publiques, on y apprend à recevoir, à regarder, à créer, à sentir et à déguster : on apprend à investir les manières de penser par des manières d’agir. Cette fin de semaine, c’est avec la salade herbier que les citoyennes ont été initiées à des sensibilités bien plus complexes que la simple combinaison de légumes. Delphine Huguet qualifie cette technique de design culinaire. Celle-ci combine l’esthétique de la présentation à un accord équilibré des goûts et des saveurs.

Pour son atelier de samedi dernier, Delphine a invité les participantes à concevoir des assiettes de la même manière qu’on élabore des toiles : définir l’espace que l’on veut occuper, les couleurs et les formes que l’on veut employer tout en prêtant une attention particulière à l’équilibre entre les saveurs. Combinant des expériences plastiques à des cultures gustatives personnelles ainsi qu’aux particularités formelles et colorées des végétaux, le design culinaire se démarque de la grande cuisine par l’anticipation du plat par le dessin. Cette technique, nous explique Delphine, vise à ce que le récepteur puisse capter automatiquement le message des combinaisons qui lui sont exposées.

Le processus de création et le résultat est sensiblement le même qu’une création plastique, sauf qu’à la fin, il s’agit d’ajouter l’acte performatif, mais non moins pragmatique, de manger son œuvre! Sculpter la part gustative de nos intentions personnelles et ajuster nos rhétoriques combinatoires sur la toile de l’assiette, telle est l’expression du design culinaire.

Partage intergénérationnel

Le dimanche, ce fut au tour de la Maison des Grands-Parents de Villeray d’investir l’un des placottoirs. Au milieu de deux poteaux signalétiques, les participants avaient tendu une corde sur laquelle étaient épinglées des recettes traditionnelles. Parmi elles, se trouvaient les classiques terrines de lapin, le papet aux poireaux, la salade de riz aux fonds d’artichauts, les bonnes vieilles fèves au lard à l’ancienne du Québec et le tout aussi répandu pouding chômeur au sirop d’érable.

Les passants étaient invités à s’accaparer de ces recettes et d’en faire siennes, de les revisiter sous un nouveau jour. Ce partage rendait compte à la fois de l’existence d’un commun propre aux traditions culinaires et des variantes qui définissent l’hétérogénéité des individus et des familles. Par le même fait, cet atelier exposait dans une ambiance intimiste ces petites bribes d’histoires familiales transmises de génération en génération qui font le plaisir des papilles gustatives depuis des décennies. Un véritable rendez-vous du patrimoine des saveurs où les expériences culinaires ont pu traduire la ligne du temps de nos origines.